- Auteur : Emmanuel Brugvin
Vallée du Rhône, un plan ambitieux contre le recul des ventes
Alors que la vallée du Rhône constate une baisse durable de ses sorties de chais en côtes-du-rhône, l’interprofession mobilise la filière pour conquérir les marchés à valeur ajoutée.
Lors du dernier salon Wine Paris, Inter Rhône a annoncé des premières difficultés dans la commercialisation des côtes-du-rhône, avec une baisse de 5% à 6% en GMS en 2022, malgré une légère remontée (+1,8%) entre le 12 septembre et la fin de l’année. Globalement, les sorties de chais affichent un recul de 6% par rapport à l’année 2021. La contraction des ventes de vins de la vallée du Rhône (hors Diois) conditionnés se ralentit pour atteindre -4% en moyenne quinquennale, quand le vrac dévisse à -10%. Sur 5 ans, la part du conditionné dans les sorties de chais de la vallée du Rhône progresse de 34% à 35,4%. Philippe Pellaton évalue l’excédent à 200 000 hl.
Les vraqueurs manquent à l’appel
La chute des ventes se concentre sur le côtes-du-rhône générique, notamment en vrac, filière qui régresse de 400 000 hl en 10 ans pour ne plus représenter que 900 000 hl sur la campagne 2021-2022. Pour le président d’Inter Rhône, la réduction drastique du nombre de spécialistes du vrac impose aux producteurs de réaliser désormais leurs propres assemblages. Alors que ce marché était très actif et spéculatif, avec des prises de commandes des vraqueurs en début d’année civile, l’écoulement des volumes s’étale désormais dans le temps. Le stock supporté par le négoce se reporte ainsi sur la production.
Face à cette situation, le Syndicat des côtes-du-rhône a souscrit au plan de distillation du gouvernement. De son côté, Inter Rhône met en place une réserve interprofessionnelle de 20% des volumes de côtes-du-rhône rouge revendiqués cette année, avec un déblocage partiel ou total en fonction de l’évolution du marché. L’interprofession n’estime pas les mesures d’arrachage d’actualité, d’autant moins que plusieurs appellations progressent : côtes-du-rhône villages avec nom de commune (+2%), luberon (+4%), cornas (+6%), hermitage (+6%) et saint péray (+7%). L’heure est plutôt à la conquête des marchés à valeur ajoutée. Inter Rhône poursuit donc son objectif à 5 ans d’augmentation de 13 M cols de la production, qui s’ajouteront aux 340 M cols actuels. Pour adapter l’offre à la demande, l’interprofession veut chercher des financements nationaux d’aides à la transformation du vignoble, notamment pour porter la production de vins blancs à 15% et de rosés à 20%, contre 12% actuellement pour chacune de ces deux couleurs. Dès cette année, des opérations de promotion spécifiques seront menées au profit des blancs et rosés régionaux.
Nouvelle stratégie export
Pour l’heure, les exportations restent atones. Sur 12 mois à fin octobre, les volumes n’ont pas retrouvé le niveau élevé de 2021 et reculent même de 3% vs 2022. La valorisation se poursuit néanmoins : +4% par rapport à 2021 et +22% vs 2020. Le grand export explique l’essentiel de la baisse des volumes, avec des contractions de 12% aux États-Unis, de 5% au Canada et de 20% en Chine. L’Europe sauve la mise avec la Belgique à +7%, l’Allemagne à +25%, la Suède à +8%, les Pays-Bas à +23% et le Danemark à +7%. En valeur, toutes les destinations progressent, y compris les États-Unis (+7%) et le Canada (+3%). Seuls le Royaume-Uni et la Chine voient leur chiffre d’affaires reculer.
Inter Rhône rappelle son ambition de porter ses exportations de 35% à 50% d’ici 2035. Les investissements annuels de promotion passent de 11 M€ à 14 M€ sur 4 ans, financés par les réserves, générées notamment par l’absence d’événements pendant les confinements. Les efforts supplémentaires se portent sur les marchés cibles, les États-Unis, le Canada et la Chine, et deux destinations à défricher, la Corée du Sud et Singapour. Inter Rhône veut favoriser une nouvelle génération d’exportateurs. Pour ne pas entrer en concurrence avec les grandes maisons de négoce exportatrices de longue date, l’interprofession veut les former et les accompagner sur des villes secondaires peu défrichées par les majors pour capter de nouveaux acheteurs.