- Auteur : Claudine Galbrun
Baromètre GreenFlex-Ademe : la consommation responsable s’essouffle
Les consommateurs, même les plus engagés, et malgré la conscience qu’ils ont de devoir revoir leur mode de vie à l’aune de l’urgence climatique, ont l’impression que les efforts menés ne servent peu ou prou à rien et éprouvent de la difficulté à trouver une offre compatible avec les limites planétaires.
Selon les résultats du baromètre 2025 GreenFlex-Ademe, 8 Français sur 10 estiment que la crise climatique les oblige à revoir leurs modes de vie et de consommation. « Pourtant, la mobilisation pour une consommation responsable s’essouffle », constate Laure Blondel, directrice conseil chez GreenFlex. Entre les « engagés », soit 13% des Français, qui tentent de réduire au maximum l’impact de leur consommation, et les « concernés », soit 60% des Français, qui déclarent avoir changé certaines pratiques au quotidien dans ce même but – ces deux populations étant regroupées sous le qualificatif de « mobilisés » – on arrive à un total en baisse de 4 points par rapport à 2024. Et pour les seuls « engagés », la baisse est de 5 points. Tandis que les « indifférents » (14% des personnes interrogées), qui n’ont pas changé leurs habitudes de consommation, voient leur score augmenter de deux points. Et puis, il y a les « agacés » qui n’ont pas envie de changer quoi que ce soit et dont le pourcentage (8%) est en hausse d’un point. « Le lien entre consommation et avenir de la planète s’effrite, même chez les plus sensibilisés à ce lien, soit 19% de la population en 2025, un pourcentage en baisse de 8 points », note encore Laure Blondel. Un premier élément d’explication à ce désintérêt est la fatigue des consommateurs, indique Stéphane La Branche, sociologue du climat et membre du Gieco (Groupe international d’experts sur les changements de comportement). « Les consommateurs ont le sentiment que leurs efforts ne servent pas à grand-chose et expriment leur découragement De plus, le système médiatique évoque désormais une hausse plus que probable de 4° des températures. Quoi que nous fassions, nous allons atteindre ce +4°. Mieux vaut donc en profiter maintenant puisque, de toute façon, on sera tous morts demain. »
Prendre en compte les externalités négatives
Le baromètre GreenFlex-Ademe confirme ces propos en données chiffrées : 39% des « mobilisés » et 47% des « non-mobilisés » éprouvent ce sentiment de découragement, auquel s’ajoute une critique de l’inaction collective, estimant que la majorité des gens ne veulent pas changer leurs habitudes. Mais si le principal frein à une consommation responsable reste la perception prix – cela coûte trop cher pour 61% des « mobilisés » et pour 55% des « non-mobilisés » – une offre trop restreinte de produits durables chez les commerçants et supermarchés est notamment évoquée par 50% des « mobilisés ». Si les entreprises ne sont pas en mesure de proposer une offre responsable, la faute en revient aux règles du jeu auxquelles elles sont soumises. « Et celles-ci ne permettent pas à une économie circulaire d’être rentable », explique Yannick Servant, cofondateur de la Convention des entreprises pour le climat. « Les externalités négatives environnementales, sociales, économiques, ne sont en effet pas prises en compte. On n’aura pas d’offre responsable à une échelle suffisante tant que les réglementations nationales et internationales ne changeront pas et que le vrai coût des choses soit effectivement établi. »
Un changement de modèle est donc nécessaire pour entretenir une dynamique collective positive. Encore faut-il choisir les bons mots. « Parler de consommation responsable a un côté moralisateur », note Yannick Servant. Sans doute faut-il aussi abandonner les messages du type « il faut sauver le climat ou la biodiversité ». « Ceux-ci ne convaincront que ceux qui sont déjà convaincus, pointe Stéphane La Branche. Or, ceux qu’il faut aller chercher sont ceux qui auraient envie de s’impliquer, en leur proposant d’autres types d’arguments que ceux purement écologiques. Cela évitera les réactions du type “ils me soûlent avec leur changement climatique”. Ne disons pas : faites du vélo parce que c’est bon pour le climat et si vous ne le faites pas, c’est que vous n’êtes pas écolo, mais faites-en parce que vous serez plus beau sur la plage cet été ! »